La troublante vérité derrière `Le monde de Nemo'
- Purple Dive
- 20 juin
- 4 min de lecture
Par Toby Corren, Divemaster et biologiste marin
Plongeur ou non, le fait est que tout le monde aime les poissons-clowns. Le célèbre film "Le monde de Nemo" a brossé un tableau idyllique de l'harmonie familiale dans le monde de ces jolis poissons vivant dans les anémones. Mais la réalité est bien plus étrange, sombre et même tordue diront certains... Lisez la suite pour découvrir l'étrange vérité sur le poisson le plus célèbre des dessins animés.

Qui sont vraiment les poissons-clowns ?
Communément appelé Nemo (merci Disney), il s'agit d'une communauté collective de 30 espèces distinctes de la famille des demoiselles (Pomacanthidae) réparties en 2 genres (Amphriprion : 29 espèces, et Premnas : 1 espèce). Ils vivent dans une gamme d'environnements allant des fonds sablonneux aux récifs coralliens et sont omniprésents dans les écosystèmes côtiers tropicaux. Ici, en Indonésie, 13 des 30 espèces ont été observées et, par la suite, ont fait l'objet de publications scientifiques. Nombre d'entre elles sont communément rencontrées à Nusa Penida, Bali. Les résultats de ces études ont donné un aperçu fascinant de la dynamique familiale de ces petits poissons et ont mis en évidence l'inexactitude scientifique du dessin animé de Disney.
Quand je serai grand, je veux être une femelle
Les poissons-clowns présentent un phénomène biologique connu sous le nom d'hermaphrodisme séquentiel. En d'autres termes, tous les poissons-clowns naissent mâles. Il existe ensuite la possibilité circonstancielle d'une évolution sexuelle pour devenir une femelle. Croyez-moi, si vous étiez un poisson-clown - un rêve que beaucoup d'entre nous ont fait - vous ne voudriez pas être un mec.
C'est elle la patronne
Les poissons-clowns mâles mènent une existence agitée. Dirigé par une patronne matriarcale (la femelle du groupe), le foyer familial (l'anémone) est habité par un mâle reproducteur et quatre subordonnés non reproducteurs (également mâles). La hiérarchie des mâles correspond directement à leur taille. Non seulement les gonades des non-reproducteurs n'ont aucune fonctionnalité, c'est-à-dire qu'ils tirent à blanc, pour utiliser une métaphore inappropriée, mais en plus ces gonades modifient leur taux de croissance par rapport à leur supérieur immédiat. Cette régulation de la croissance empêche le mâle dominant de les considérer comme une menace pour sa hiérarchie, ce qui entraînerait leur expulsion de la sécurité toxique de l'anémone et leur exposition aux grands prédateurs du récif (comme les barracudas problématiques, si vous vous souvenez de l'intrigue du dessin animé).
Merveilleuse symbiose
Le poisson-clown est un exemple classique de relation symbiotique avec son anémone. L'anémone offre une protection sous la forme de tentacules infusés de toxines, contre lesquelles le poisson-clown est immunisé. En échange de cette précieuse protection, le poisson clown défèque sur l'anémone. Dans un contexte humain, cette relation semble plutôt bizarre, mais les anémones adorent littéralement ce caca ; elles survivent grâce à ses nutriments, comme l'ont montré des études récentes. D'autres avantages pour l'anémone sont le débarras des parasites et la protection contre certains prédateurs. Les poissons-clowns sont assez combatifs lorsqu'il s'agit de protéger leur maison contre les amateurs d'anémones pour le souper, comme les poissons-papillons.

Ce que Disney omet de mentionner
Revenons à nos moutons, ou plutôt à nos poissons. L'existence déprimante d'un poisson-clown mâle peut être sauvée grace à la règle de la succession. Supposons qu'un frère aîné ou un père poisson-clown périsse en raison de l'un des nombreux dangers du récif. Dans ce cas, la nécessité d'un remplacement signifie que la croissance du poisson clown subordonné sera stimulée et qu'il prendra la place du membre décédé (plus grand) de la famille. Mais surtout, cela s'applique au mâle dominant dans le cas de la mort de la reine-mère.
Si nous mettons en pratique ce phénomène scientifique et l'appliquons à la situation de Nemo, il se produira quelque chose de choquant pour notre moralité humaine :
C'est ce qui se passe dans le dessin animé :
La mère de Nemo est dévorée lors d'une rencontre problématique avec un barracuda.
Cette mort amène Marlin (le père de Nemo), veuf, à développer un système de surprotection psychologiquement préjudiciable, ce qui entraîne la rébellion de Nemo et son départ de la sécurité de l'anémone (le foyer du père célibataire)
Tout cela conduit le père à partir lui-même à l'aventure en dehors de l'anémone après avoir perdu et (spoiler alert: on vous raconte la fin du film) "retrouvé Nemo".
En réalité, quelque chose de bien plus intéressant, mais inapproprié pour un dessin animé pour enfants, se produirait :
La mort de la mère de Nemo déclenche un changement hermaphrodite chez Marlin,
Il deviendrait alors la nouvelle mère de Nemo.
En conséquence, Nemo, étant le seul mâle subordonné restant, développerait rapidement des gonades fonctionnelles
Puis, sans la moindre sensiblerie ni le moindre chagrin pour le récent décès de la mère, Nemo et Marlin entameraient une relation sexuelle "incestueuse", donnant naissance à une toute nouvelle famille de petits Nemo.
Franchement, Œdipe peut aller rhabiller... La mer est si pleine de merveilles !
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